paysames johanne gicquel

« Ce coup de poing sur la table tient de la déclaration d’amour, de l’objet d’art et du cri de guerre. Un coup de projecteur rare sur celles qui nous nourrissent. « 

Hélène Piot, Régal

« C’est puissant, c’est  beau, ça pique. » « Poétique et politique »

Jérôme Cadet, France Inter

« Images magnifiques. évite remarquablement le piège du romantisme »

la Décroissance

« Johanne écrit vrai, sans fard, sans ronds de jambe. Le texte est fluide, se boit comme du petit-lait. Les mots sont tendres et crus. Et, avec Paysâmes, elle lève le voile sur un univers qui nous concerne tous. […]. Oublier est d’une simplicité enfantine. […] La technologie pense de plus en plus à notre place, et même les miroirs réfléchissent parfois mieux que nous. En lisant ces pages, je suis tombée en amour pour ces Paysâmes auxquelles Johanne offre un écrin de papier d’une féroce beauté, au contenu riche et nécessaire, à mettre entre toutes les mains. »

 Marlène Tissot – écrivaine poétesse romancière – extrait préface

genèse du projet Paysâmes

johanne gicquel au fournil - Paysâmes

Paysanne et boulangère 10 ans de ma vie, j’ai eu envie de raconter le métier quand j’y étais, dans les champs. Et puis, j’ai quitté l’agriculture. J’en ai divorcé. Choix ? non-choix ? […] Tout est tellement complexe. Tout est tellement humain.e.

Disons que j’ai jugé le plus sain, alors, de prendre mes cliques et mes bottes. De raccrocher la pelle. Le cœur meurtri mais sûre que c’était pourtant le choix le plus sage. J’avais alors un tel sentiment d’être à côté de mes envies, de moi-même. Peut-être n’avais-je pas su imposer, moi, mes choix à mon Autre, compagnon et collègue ? Et puis, le contexte. L’usure. Accéder à quelques hectares de terre aura demandé des années. 10 ans d’incertitudes à se demander, si un jour – si un jour des terres « me » reviendraient, pour pérenniser la ferme, investir, rassurés.

« Il faut des jeunes en agriculture ! ». Discours. Discours et bla-bla-bla. Personne ne voulait m’en céder, des terres, visiblement.

C’est après une Ne désillusion que j’ose me mettre en colère. Colère d’une femme indignée. Les terres : pourquoi toujours aux mêmes ? Pourquoi ? J’ai engagé la lutte, j’ai mobilisé, localement. La lutte, je l’ai menée. La tête haute. Même si les larmes ont souvent coulé au coin, après encore un « On vous soutient, Madame, mais on ne peut rien faire ». Parole d’élu local, d’élu de la République. Qui dit son impuissance. Qui raconte les lobbyistes. Ah ? Vous ne pouvez rien faire ? […]

Je me suis battue. J’ai eu mes 10 ha mais le cœur n’y était plus. L’envie n’y était plus. L’amour n’y était plus. Usure, lassitude.

J’ai arrêté. Et j’ai vécu l’après-carrière. […]
Et j’ai replongé dans le monde qui ne connaît rien à l’agriculture, ni bio ni durable, ni agriculture tout court.

Alors, j’ai eu envie de témoigner, raconter. Comment ? Sans illusion, sans fard. mais en disant toutes celles et tous ceux qui tous les jours mouillent la chemise pour nourrir les autres avec le meilleur.

Paysâmes est né de cette réflexion, de ce constat, désillusionné – mais forte d’un constat : ce n’est pas en se taisant qu’on fait avancer la cause. Je vais faire ce que je sais faire : écrire, raconter.

Paysâmes – intro en breton

2020. 2. 0. Pellaet n’eus mabden a-zoc’h an Douar, a-zoc’h ar labour-douar, a-zoc’h ar labourizion-douar ; el-se ema. Neuze, damp d’en um gaved ged merc’hed hag o deus en um zimezet get an douar. Ar mouezed-se ? gouiet a ran piv int ; unan anezhe on bet ! Hiriv, e tan en-dro devate get ma sac’had a « boltretourez-kelaouerez », get ar pal « kontañ a-ziar o fenn ». Ar levr ? 10 poltred anezhe ; poltredoù dre skeudenn ha dre skrid, e gwenn ha du. Ar merc’hed-se o deus choejet da labourad e Breizh. Ar levr-man ? ne vo ket nag ur bibl teknikel, nag ur levr-hentañ a-zivoud ar pezh a vehe dereat gober ; deskañ a ra an douar an uvelded. Ar levr-man ? peogwir eo rekiz gober ha gober c’hoazh abenn ma vaint anavezet, ha peogwir o deus ur bochad traoù da zeskañ deomp.
Emichañs diskoeiñ, dre ar levr « Paysâmes », un tu arall ag ar labour-douar e Breizh, doare ar mouezed, c’hoant gete moned war-raok.

Merci à Andréa Le Gal pour la traduction

Paysâmes : 1 livre, 3 parties

mes origines agricoles

En préambule à cet ouvrage, j’ai voulu raconter qui j’étais, et d’où j’écrivais. Paysanne ? Oui, je l’ai été. Mais je n’ai pas été que « celle-là ». – la jeune femme, convaincue par la nécessité de produire en bio.

Avant, il y a eu la môme poussée à la ferme, auprès de Mémé, ma chère grand-mère, une femme née dans les années 20, élevée à la dure auprès de bonnes soeurs qui n’avaient de bonne que le nom, faut-il le penser. Brf, j’ai eu envie de la raconter, par hommage, parce qu’elle avait été « cultivatrice » (terminologie de l’époque) toute se vie.

Je l’ai racontée, elle et mon autre grand-mère. Mémère. Elle, même génération, mais toute autre femme : plus libre, moins catho. Ces deux femmes seront de celles qui cultiveront la terre (bretonne) à la sueur de leur front. Et qui verront leurs fermes connaître des destins opposés.

Bref, je les évoque, pour en creux raconter cette agriculture bretonne « miséreuse » (qualificatif usée par une femme interrogée) des années d’après-guerre. Celle qu’il a fallu sortir de l’ornière. Leur histoire, esquissée ici, illustre le sort des fermes. Certaines deviendront des exploitations, les autres disparaîtront dans l’indifférence souvent, dans le mépris, au pire.

mémé Paysâmes Johanne Gicquel

11 femmes pour raconter l’agriculture (bio) bretonne

christiane, éleveuse de Hightlands

Paysâmes, ce sont des rencontres. Avec les femmes agricultrices, paysannes (c’est selon). 11 femmes qui se révèlent en 10 portraits. Des bretonnes d’aujourd’hui, qui bossent et nourrissent le monde – excepté Aziliz, qui elle, elle fait dans l’animal de compagnie. Pas d’encensement, inutile. Des femmes, belles par leurs engagements, tout court.

Il y a Gene, qui fait dans l’oeuf et dans la poule. Ou dans la poule et dans l’oeuf. (J’ai pas demandé qui était arrivé le premier.)

Il y a Enora, qui élève un gros poilu breton (non, breton et poilu, ça rime pas forcément). Celui-là a les yeux cachés par ses oreilles et l’éleveuse, elle, a les yeux qui brillent quand elle en parle.

Et puis, il y a Fabienne, qui court, qui court, de son gîte à son huile à son Rémi Geotrouvetou. Attends-moi, Fabienne !

Il y a Cécile, qui est encore plus craquante que ses gariguettes, qui plante et récolte 10 heures par jour pour nous gaver, quand ça veut bien pousser.

Il y aussi Stéphanie, qui pâtonne et façonne pour faire croquer les papilles de ses compagnons. La femme est douce, jolie, ronde comme ses pains. Et la vie à la ferme ?

Il y Aziliz, la fille des landes (comme moi), du centre Bretagne (pas comme moi), Aziliz qui par fidélité « pour ses amies les chèvres » a décidé de revenir à la Terre – pourtant maltraitante parfois, la Terre.

Lauriane et Audrey, elles, font dans le système tout herbe – parce qu’une vache, c’est une brouteuse d’herbe et parce qu’une vache, c’est génial pour transformer l’herbe en bon lait. Bah oui.

Martine, elle, est une de ces éternelles militantes, un temps « pessimiste ». Elle dit avoir repris du poil de la bête. Alors, l’ex-paysanne se fait porte-parole de l’agriculture chez les écolo. Drôle d’attelage. Il en faudrait plus, de ces attelages atypiques.

Et puis, il y a Christiane. La femme élève des mastodontes. La femme bouleverse quand elle prie pour ses animaux, les remercie pour leur sacrifice.

Et puis, là-bas du côté Nord Bretagne, il y a Françoise. Françoise qui achève, aux côtés de son compagnon de vie, de route, de scène, sa carrière de paysanne. Et qui transmet à sa fille, avec confiance.

1 complementerre historico-social

Importance d’un contenu distancié

Il me semblait incontournable de compléter mon propos – les portraits, mes ressentis – par un apport plus théorique. Plus distancié.

Pour ce faire, je suis allée à la rencontre d’ex-accompagnatrices ayant œuvré aux côtés des paysannes et agricultrices, et d’Anne Guillou, sociologue léonarde, éminente spécialiste de la place des femmes en agriculture. de quoi donner de l’eau ou moulin et d’approfondir la question de genre.

paysâmes JOhanne Gicquel

Interview

Anne Guillou, sociologue

Yolande Landais, ex-animatrice à la Chambre d’Agriculture 56

Marie-Claude Piel, ex-conseillère Chambre d’agriculture 56

Essentiel(le)

Ces quelques pages de Paysâmes regroupe des données relatives au genre, recueillie dans la littérature. De quoi se rendre compte qu’il reste encore beaucoup à faire pour les femmes de la Terre. Et qu’elles osent prendre leur place. (Mais on en conviendra, l’enjeu n’est pas qu’agricole ni propre qu’à l’agriculture.)

Le matriarcat breton est un mythe. Le monde paysan reste emprunt de misogynie.

Anne Guillou, sociologue

paysâmes : 1 livre et 1 projet global

Une aventure participative

Paysâmes a fait l’objet d’un financement participatif. Je tiens à remercier ici tous.toutes les souscripteurs. Cela a permis de rassembler la trésorerie suffisante pour payer l’impression et la correction.

Ce choix, exigeant et chronophage (je le précise ici, pour les auteurs en devenir) a été fait en plein covid. C’était l’occasion de plancher sur ce gros projet et puis, de me challenger – j’aime bien les défis et a priori, rassembler 5.000 € en était un. (Je me suis régalée pour m’essayer d’ailleurs à la vidéo, outil d’information « conseillé » sur le quel je lorgnais).

Comme expliqué lors de la campagne, les motivations ont été simples : pragmatisme, efficience et liberté. Libre de laisser la place à l’imprévu. Libre du ton employé, de dire les choses qui se taisent, libre (de tenter) d’expliquer les méandres d’une vie en agriculture et de l’agriculture, tout court.

Le projet sur Ulule : https://fr.ulule.com/paysames/news/

des envies de poésie pour raconter la Terre

Paysâmes, c’est du reportage, du texte au « je », et des poèmes, libres. Il nous faut de la poésie. Je le crois. Heureuse donc de la contribution de Yann Morel, poète breton, libre comme il se plaît à se définir, a eu l’extrême bonté de signer deux textes. Un grand merci à ce poète, touchant, très touchant.

Et (je le rappelle, histoire d’insister sur cette dimension poétique du livre Paysâmes), Marlène Tissot, la préfaceuse, est elle aussi une poétesse à l’écriture, vive, nerveuse, alerte. (Allez donc lire son « J’emmerde ». Et tellement humaine quand elle raconte son grand-père. Un énorme merci à la femme, si humble. Si humaine.

Extrait du livre Paysâmes « Chants de Terre », lu par Marine Durios, comédienne et par Simon, membre de la troupe l’Art-Boretum. Un autre grand grand merci à eux.

Lien vers la video : Chants de Terre

Paysâme.
Alors, vas-y, raconte-moi, raconte-toi.
Dis-moi !

Paysâme.
Ta vie, tes noces.
Le goût des bêtes, le goût d’un homme.
Le choix de la tête, les raisons du cœur,
L’amour et la détestation, parfois.
Paysâme !
Dis-nous tes œufs, tes poules – tes poules qui pondent des œufs,
Tes œufs numérotés, mirés, conditionnés, colisés, cassés.
Ah, tes rires au marché !

Paysâme.
Raconte-nous.
Dire la maladie. Ce crabe qui croque, le corps qui craque,
La femme qui s’oublie. Septicémie. Saloperie.
Parce que faut produire.
[…]

Paysâme.
Dans ton métier, il n’y a pas de noces faciles.
Jamais de certitudes.
Quand tu plantes, agenouillée, sans doute es-tu tentée de demander un peu d’indulgence à Celui d’en haut.
Et de te dire que ce sera comme ce sera, quoi qu’il en soit. Ainsi soit-il.  

aziliz chevrière Paysâmes Johanne Gicquel

Mise en musique

A la 103e question « pourquoi ce livre Paysâmes », j’ai voulu répondre « autrement » : plus court, plus percutant. Emportée par le sujet, et les interviews parfois trop bien tenues, le discours devient vite lisse.

Alors, j’ai écrit le pourquoi de Paysâmes en mots plus courts, façon poésie libre (clin d’oeil à Yann Morel, poète breton qui a signé deux textes pour Paysâmes). Et pour que ça percute tout à fait, j’ai voulu le mettre en musique – vieille envie remontée à la surface comme une évidence. Morceau libre de droit choisi par Philippe Pastor, qui a posé sa voix d’homme sur mes mots de femme.

Video Paysâmes

Autour et après le livre Paysâmes

Depuis Paysâmes, j’ai exposé, causé, conférencé. Ce livre, c’était un outil de partage et un début, aussi. L’expo, les causeries sont d’autres façons pour moi d’intervenir ou de raconter l’agriculture bio/durable et féminine.

la suite ? J’y ai longuement réfléchi. Et j’ai tranché pour une version mâle – histoire de ne pas m’enfermer ni de me faire enfermée dans la case féministe – même si je suis depuis toujours, profondément attachée à la cause des femmes. Bref. Je fais court. (Je réserve le débat aux causeries).

J’en suis arrivée à Paysômes. Le livre, sorti en toute fin 2023, permet d’aborder d’autres sujets : la maladie professionnelle, la méthanisation, le suicide. Bref, du poétique et du terrien, une nouvelle fois. Et c’est aussi un ouvrage et un regard de femme.

revue de presse paysames

LOCATION EXPOSITION JOOOA

causerie paysames paysomes johanne gicquel

paysomes johanne gicquel portfolio