Voilà lancé ce projet qui me tenait tant à cœur : Je te dis M, une conférence-spectacle engagée, citoyenne, humaniste, féministe. (Allez, osons !)
Il fait partie des grands gros projets, de ceux qu’on ne lâche pas, quand bien même ils sont parfois rudes et ardus. Le projet découle de tout le travail mené ces 5 dernières années, depuis la publication de Paysâmes.
Ici, la genèse. En quelques mots. Une genèse conjuguée au féminin.
genèse : Paysâmes
Au départ de Je te dis M, il y a Paysâmes.
Cet ouvrage de papier se voulait un livre de femme. (ex-paysanne, qui connaît son sujet, de près, de l’intérieur), qui raconte les femmes et en creux le monde agricole breton, alternatif. L’idée ? Croiser le regard avec ces Autres, qui ont fait le choix de la Terre, pour évoquer les réalités d’un monde exigeant, rude, et misogyne. Et dans le quel il reste à faire, encore et toujours pour le droit des femmes.
Paysâmes a été l’occasion de plonger dans mes racines paysannes, rurales, de sauter dans l’histoire familiale. J’évoque mes 2 grands-mères, 2 « cultivatrices », très différentes dans mes yeux de môme. J’évoque leur mariage avec la terre, plus ou moins « subi ». Je les évoque car leur ferme connaîtront des destins opposés : l’une disparaîtra – comme tant d’autres ! – dans les années 80, l’autre grandira, grandira, grandira encore.
la place des femmes
Les raconter a permis d’illustrer le patriarcat de ce monde rural, dans les années d’après-guerre. Alors que c’est l’une de mes grands-mères qui hérite de la ferme familiale, quelques années plus tard, plus aucune mention d’elle dans les papiers : seul le nom de l’époux apparaît dans les documents officiels ou ceux de l’assurance. Cette misogynie ? une vue de l’esprit ? L’interview d’Anne Guillou, sociologue de la place de la femme en milieu rural (dans le Complémenterre du livre) permettait de se faire une idée plus précise de la situation et de la place des femmes. En court : reléguée au second plan.
« Elles se qualifiaient de bouche trou elles-mêmes », ajoutait d’ailleurs une autre experte du monde agricole, Yolande Landais (accompagnatrice à la chambre d’agriculture du Morbihan entre 1960 et 2000). Le matriarcat breton ? Dénoncé par Anne Guillou. (La femme bretonne, omnipotente ? Peut-être, mais alors juste dans sa cuisine !)

passé et présent conjuguée au genré
Pour en revenir au présent, ce plongeon dans l’histoire familiale m’a permis de mettre à distance une réalité qui m’a souvent emplie de (?) sentiment d’injustice : sentiment que les garçons étaient plus importants que les filles. Ils avaient, eux, des choses intéressantes à faire ! Pas que le ménage ! (…). Oui, en grandissant, j’ai très vite eu ce sentiment que fille et garçon, ce n’était pas pareil et que, évidemment, c’est plus drôle d’être un gars !
Le hic, c’est quand l’éducation genrée continue de se perpétuer. Si j’ai porté le plus grand soin à ne pas « genrer » celle de mes enfants, le fait est que j’avais encore bien du chemin à faire pour me « déconstruire ».
Ecrire Paysâmes – puis Paysomes – m’a mis une sacrée claque ! J’ai compris à quel point encore j’étais pétrie de conditionnements. J’ai été très en colère, oui, en rédigeant Paysômes (le pendant masculin de Paysâmes).
Je me suis rendu à quel point j’avais été moteur sur ma propre ferme (quittée en 2016 après 10 ans de travail acharné, suite à des galères d’accès aux terres notamment). J’ai été en colère – après moi – en réalisant à quel point j’avais été injuste (envers moi-même, toujours) de la quitter, comme ça, sans rien ou presque, endettée qui plus est – ironie.
4 ans plus tard : que sont devenues les paysâmes ?
Ces dernières années, ces derniers mois, j’ai rencontré plusieurs Paysâmes et recueilli des témoignages de femmes, qui ont abandonné leur activité agricole, de gré de force, contraintes ou plus ou moins volontairement, parce que (…). L’une d’entre elles m’a raconté son départ de la ferme, précipité, qui l’a plongé dans le désarroi (elle ne l’a pas forcément exprimé clairement : pas facile) et dans la pauvreté. Normal ou pas ? Indifférence du monde ? …
Voilà encore un de ces sujets à aborder. Car aujourd’hui, le monde (agricole) ne tourne pas comme après-guerre. Il serait donc temps de revoir un peu comment on protège ses travailleurs, et surtout peut être, ses travailleuses.
Alors, ça, voilà : ça va être évoqué dans Je te dis M.
Le projet Je te dis M
Qu’on se le dise : ce projet vise à faire bouger les lignes pour plus d’équité, de justice sociale, pour que les victimes soient identifiées et soutenues. (Les violences institutionnelles sont parmi celles évoquées, celles vécues par ex. post carrière.)
J’ai besoin d’être relayée. Si vous le pensez utile, si vous avez envie de soutenir ce projet d’intérêt collectif (j’ose à le dire), je compte sur vous.
Johanne
Pour dessiner le monde que l’on veut.
Soutenir le projet sur kengo.
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